À Lomme, depuis le début de la semaine, un groupe de 15 Moldaves est hébergé chez des particuliers, dans le cadre d’un échange culturel qui a commencé fin des années 90 par l’envoi de livres de littérature française dans ce pays très francophile et encore largement francophone.
Rencontre avec Sveltlana Manuil, professeur, passionnée par notre culture.
Il a fallu insister pour que Sveltlana accepte de parler de son parcours de femme, de professeur de français. Elle préférait vanter les mérites du président du comité d’administration de l’enseignement des langues étrangères de son district, ou encore du directeur adjoint de l’éducation du collège général de commerce où elle enseigne et sans qui elle ne serait pas là.
Le protocole qui passe par l’énumération de titres auxquels nous ne sommes plus habitués est très important à ses yeux. On n’oublie pas si facilement les réflexes imposés par le grand frère soviétique, mais la joie de se retrouver pour la troisième fois de sa vie en France prend vite le dessus. « La première fois, c’était à Caen, en 1977 ». Un privilège à cette époque de pouvoir franchir le rideau de fer. Étudiante, elle venait de gagner un concours administratif lui permettant de devenir professeur de français.
Encore aujourd’hui, elle parle avec émotion de toutes ces bourgades se terminant par « ville ».
« Je n’y suis jamais revenue, malheureusement je n’ai pas pu continuer à correspondre avec les Français que j’avais rencontrés à l’époque, en raison de la profession de mon mari. »
Militaire, il faisait partie d’un service de renseignement. Agent secret ? Elle ne démentira pas, « tant qu’il a fait ce métier, il m’était même interdit de parler à des Français, dans une gare cela est loin, maintenant. »
Elle n’est plus obligée d’accompagner son mari dans ses missions, en Pologne notamment, et peut se consacrer entièrement à l’enseignement et à la promotion de la langue française dans son pays. Pour cela, elle n’a pas hésité, voilà huit ans, à créer un festival de chanson, française naturellement.
« Je voyais que l’anglais prenait progressivement le dessus dans un autre festival ». Et de conclure : « Depuis toujours, peut-être parce que le moldave a aussi des racines latines, les professeurs de français ont en commun d’être très volontaires. C’était déjà vrai sous l’époque soviétique, cette langue nous faisait rêver de l’occident ». Son auteur préféré ? « Prévert, Rousseau aussi ».
Article publié sur http://www.lavoixdunord.fr