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Terreur et meurtres dans la nuit des déportations

Article de Gheorghe Mirzencu

« A l’école, on nous a demandé un jour quelle profession nous aimerions avoir et j’ai dit que je voulais être chanteur. Mais en 1940 les soviétiques sont venus et nous ont « libérés » de tout rêve. Au lieu de faire une carrière de chanteur, j’ai enduré la famine et la pauvreté dans les froides étendues sibériennes ». (Récit de Mihai Țîrdea, déporté à l’âge de 12 ans du village de Tătăreşti)

Les « libérateurs » nous ont avant tout comptés

Une note rédigée par uin certain Goglidze, représentant à Chișinău du comité central du parti communiste, adressée en mai 1941 au dictateur Staline, énumérait neuf catégories de personnes qui devaient être déportées. Parmi eux, anciens activistes des partis de Roumanie, 652 maires et députés, 440 policiers et gendarmes, 147 propriétaires de terrains, etc. Le chiffre total diffère dans diverses sources, mais on sait que le NKVD (la police soviétique) a affiché des dépenses pour le transport de 85 mille personnes de Moldavie et des Pays Baltes.

Mobilisation totale des activistes

Dans une note adressée à son supérieur de Chișinău, le secrétaire du parti communiste du district de Straseni décrivait de manière détaillée les actions entreprises par les autorités pendant les nuit et les jours des déportations. Le document indique que l’« opération d’expulsion » avait commencé le 4 juillet 1949 par la convocation des réunions des activistes locaux avec la participation des représentants du NKVD. Le jour de l’opération, tous les communistes, komsomols et autres activistes ont été mobilisés.

349 familles de « koulaks et autres éléments hostiles » figuraient dans la liste des déportations. Les 6-7 juillet, à la gare de Strășeni sont arrivées seulement 252 familles (733 personnes, y compris : 291 hommes, 300 femmes, le reste étant des vieux, des enfants et des adolescents).

Enfants de Bessarabie. Sibérie. 1950

Le document mentionne également que « la nuit du 5 au 6 juillet, 69 familles qui devaient être déportées se sont cachées ». « Les chefs de famille se sont retirés dans les forêts ou se cachaient chez des proches et faisaient de la propagande contre-révolutionnaire ».

Les soldats soviétiques tuaient à gauche et à droite

A noter la conspiration avec laquelle les soviétiques avaient préparé l’opération de génocide anti-moldave de 1949. Le même document spécifiait : « Le 5 juillet, quand des colonnes de camions se déplaçaient sur la route de Straseni vers Nisporeni, on avait lancé dans les villages des rumeurs que la guerre aurait commencé. Nos camarades du parti, eux-aussi, appelaient leurs chefs pour demander si la guerre n’avait pas commencé et pour apprendre où se dirigaient ces camions-là. On leur répondait qu’il s’agissait probablement de manœuvres militaires ».

Le sécretaire du parti du district avait informé ses supérieurs de Chisinau que « pendant l’opération de déportation il y a eu quatre meurtres ». Mais selon d’autres sources, il y a eu plusieurs cas d’usage de l’arme à feu contre la population pacifique. En voilà quelques-uns.

Dans le village de Ciuciuleni, le sergent russe Bogomolov qui guéttait la maison d’un paysan fuyard a fusillé une enfant de 15 ans - Pelagheia Bodrug qui passait de côté et, remarquant le soldat, s’est mise à courir.

Deux autres meurtres ont été commis dans la zone Voinova-Bravicea où le fils d’un forestier et une fille avaient été tués à cause de s’être cachés des soldats soviétiques. Non loin du village de Recea, un homme a été tué sans aucune raison.

Des circonstances stupides ont causé la mort du paysan Alexei Croitoru de Strășeni, âgé de 60 ans. Le soldat russe Kuznețov et son copain ont tué de la baïonette le vieux pour le simple fait d’avoir réfusé de leur donner du vin.

Certains souffraient dans les wagons de déportation, tandis que d’autres construisaient le « communisme »

Juste après l’opération de déportation, les soviétiques ont décidé de « battre le fer tant qu’il était chaud ». Des réunions générales de la population ont été convoquées dans toutes les localités afin de parler aux gens du « grand amour de Staline pour le peuple » et d’encourager les paysans à adhérer aux kolkhozes. Dans le village de Tătărești, par exemple, une telle réunion a eu lieu le 7 juillet même, c’est à dire, le jour quand le train avec les déportés avait juste quitté la gare. En présence des énvoyés spéciaux, le président du conseil local avait déclaré avec emphase : « L’ennemi a été détruit, rien ne nous empêche déjà de construire notre avenir communiste »… Des discours à ce message étaient prononçaient dans tous les villages de Bessarabie ces jours-là.

Beaucoup de paysans se sont ainsi vus contraints à s’inscrire dans les kolkhozes pour éviter la terreur. D’autres ont décidé de quitter leurs maisons pour se sauver, manifestant ainsi une sorte de résistence anti-soviétique, certains ont même pris les armes.

Les 8 et 9 juillet, dans les villages de Recea, Zubrești et Ghelăuza ont été diffusés des dépliants qui menaçaient de la mort les activistes locaux et les dirigeants des kolkhozes.

Les soviétiques se plaignaient alors que des « éléments hostiles » diffusaient des rumeurs qu’une guerre allait éclater, comme en 1941.

Article repris sur http://www.union.md/uinfo/mass-media/teroare-si-omoruri-in-noaptea-deportarilor

Traduit pour www.moldavie.fr

Le 6 juillet 2012

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